L'activite poetique de Valery (1871-1945) se divise en trois periodes. La premiere, qui s'ouvre en 1884, est interrompue en 1892 par la crise de la <<Nuit de Genes>>. Apres plus de vingt ans de <<silence>> public, le retour a la poesie inaugure par La Jeune Parque (1917) produit ensuite deux recueils de poesie ancienne et nouvelle, l'Album de vers anciens et Charmes, avant d'aboutir a la poesie amoureuse que le vieux poete, au soir de sa vie, ecrit pour sa maitresse. Nous ebauchons ici une vue d'ensemble et un classement formel des poemes de jeunesse de Valery, qui s'echelonnent de 1884 a 1900. En nous appuyant sur le Cahier de Cette, sur les notes de ses OEuvres (Pleiade, t. I), et sur ses manuscrits de <<Vers anciens>> (BnF, 2 vol.), nous proposons une recension des poemes qu'il a ecrits pendant cette periode. Le corpus partiel presente ici permet de deceler dans la versification du jeune Valery deux tendances majeures : un penchant vers le poeme a forme fixe, le sonnet en l'occurrence, contrebalance par le souci de s'en affranchir. Pour rendre compte de ces mouvements contraires sinon complementaires, nous examinons d'abord la predominance de la forme du sonnet a travers ses pastiches de Heredia (sonnet regulier) et de Mallarme (sonnet anglais). Ensuite, parmi ses diverses tentatives pour sortir de la forme fixe (poeme en prose, vers libre, etc.), nous fixons notre attention sur les poemes en vers non divises en strophe reguliere, qui sont ceux dont les vers reguliers autorisent la forme la plus libre. Leur comparaison avec le sonnet fait ressortir la liaison intime qu'ils entretiennent avec lui. A titre d'exemple, <<Narcisse parle>>, d'abord ecrit sous la forme d'un sonnet, a ete refait sous celle d'un poeme de 53 vers, tandis que <<Profusion du soir>> offre une genese inversee : si la disposition de ce poeme de 97 vers dont les 14 premiers forment un sonnet, suggere un developpement parallele a <<Narcisse parle>>, la decoupe du sonnet liminaire se situe en realite a la fin de la genese. L'elaboration d'un tel artefact peut se lire dans l'optique d'une <<autobiographie dans la forme>>, en un autre sens que celui que l'auteur de La Jeune Parque donne a cette expression : n'illustre-t-elle pas le passage des sonnets de jeunesse aux poemes longs de la maturite? Le jeune Valery mene ainsi un va-et-vient constant entre une forme fermee qui incarne la beaute complete, et une forme ouverte susceptible de s'etendre indefiniment, au risque de la fragmentation et de l'inachevement.
抄録全体を表示