Dans
l’Introduction à l’Anthropologie, Foucault rend hommage à l’
Anthropologie « pragmatique
» de Kant, malgré la critique acérée qu’il adresse à l’« anthropologie philosophique »
post-kantienne. Car, loin de faire jouer le rôle d’une
Critique à la connaissance empirique de
l’homme, Kant s’y interroge sur les divers aspects du rapport à soi des sujets en mobilisant le
concept d’« usage » (
Gebrauch), qu’il saisit à la fois au niveau de l’« art » (
Kunst) et du « langage
» (
Sprache) : ce sont ces « usages » qui constituent autant de systèmes régulateurs, sans
cesse renouvelés, de la connaissance et du comportement des « citoyens du monde ». L’
Anthropologie
« répète » ainsi la
Critique de la Raison pure et la
Critique de la Raison pratique
au niveau empirique des hommes dans le monde, tout en évitant la confusion entre l’
a priori
et l’
originaire. Et elle ouvre en même temps la voie à la « philosophie transcendantale » de
l’
Opus postumum, dans laquelle la « finitude » humaine est définie comme le « pli » de la « totalité
» (Ganz) : source de la « temporalité » et de la « dispersion », cette auto-affection du
« monde » offre le fondement du rapport à la « vérité » et à la « liberté » des hommes. En remaniant
ainsi l’interprétation ontologique de Kant selon le Heidegger du
Kant Buch, Foucault
s’écarte de la perspective heidegerrienne et se revendique de l’anthropologie kantienne,
pour s’orienter vers la « critique historique », dont l’ « archéologie du savoir » et la « généalogie
du pouvoir » seront des avatars ultérieurs.
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