Bulletin d'Etudes de Linguistique Francaise
Online ISSN : 2432-0668
Print ISSN : 0286-8601
ISSN-L : 0286-8601
Articles
Alternance que / qui et le problème du pseudo-sujet
Akihiko OHNO
Author information
JOURNAL FREE ACCESS

1979 Volume 13 Issue 1 Pages 1-13

Details
Abstract
La règle que nous appelons ici "Conversion de que en qui (CQQ)" a été proposée indépendamment par GROSS (1968) et MOREAU (1971) afin de traiter certains problèmes syntaxiques du français différents du nôtre (voir la bibliographie). Elle consiste à transformer la conjonction que en qui dans le contexte préverbal, soit
CQQ : que → qui / —V
Nous avons montré dans cet article que la même règle joue un rôle décisif dans la dérivation d'une série de pronoms interrogatifs dite composée telle que qui est-ce qui, qu'est-ce qui, etc. Elle peut en effet rendre compte de l'alternance entre que et qui à la fin de chaque pronom interrogatif en question. Comparez à titre d'exemple la dérivation de qui est-ce que avec celle de qui est-ce qui.
(I) qui est-ce que :
(1) est-ce que [s Jean a rencontré qui]? →<WH-MVT>
(2) qui est-ce que [s Jean a rencontré]? →<CQQ> (inapplicable)
(II) qui est-ce qui :
(3) est-ce que [s qui a dit ça]? →<WH-MVT>
(4) qui est-ce que [s a dit ça]? →<CQQ>
(5) qui est-ce qui [s a dit ça]?
A première vue il paraît qu'il n'y a rien d'incovénient jusqu'ici. Pourtant si l'on examine de plus près la phrase engendrée à la fin de la seconde dérivation (cf. (5)), on reconnaîtra un problème épineux : pourquoi est-elle acceptée comme grammaticale, quoique dépourvue de sujet de la proposition subordonnée?
Notre approche consiste à postuler une règle de réanalyse qui tient la structure telle que (5) pour une proposition relative dont le sujet est le morphème qui, introduit par CQQ. Autrement dit, nous pensons que CQQ est une règle de déguisement qui a pour fonction de camoufler l'absence du sujet subordonné authentique en créant un pseudo-sujet épelé qui. (Sinon la structure sous-jacente bien-formée telle que (3) n'apparaîtrait jamais comme une phrase bien-formée.)
Cette analyse a double avantage. Elle peut d'abord rendre compte de tous les autres cas où est invoquée l'application de CQQ. D'autre part, elle nous aidera à comprendre, voire à expliquer pourquoi une telle règle existe en français. Ajoutons enfin qu'il serait fort intéressant de voir s'il se trouve dans la même langue d'autres phénomènes comparables à CQQ et à la règle de réanalyse qui y est associée.
Content from these authors
1979 All copyrights are reserved by the authors.
Next article
feedback
Top