抄録
Bien que les diverses anthologies de la littérature égyptienne en traduction rangent l'Histoire de Sinouhé dans les narrations en prose, un style demi-poétique (Erman), très proche du style des oeuvres didactiques, appelé ‘orational style’ par Lichtheim, parait prédominant non seulement dans les deux messages, mais aussi dans la partie narrative. Pour vérifier cette impression, j'ai essayé d'examiner la structure stylistique des lignes ponctuées par les points rouges des manuscrits ramessides (les lignes sans ponctuation sont restituées par moi-même). La méthode que j'ai adoptée n'est pas celle de Fecht, car ses règles métriques entravent la division naturelle d'un poème en lignes et en groupes de lignes; quatrième des sept chants d'amour du P. Beatty I, par exemple, est divisé en (2+2)+4+(2+2)+(2+2)+2=8+10, comme la plupart des traductions le montrent, Fecht, pourtant, le divise en 2+(2+1+2+2)+2+(1+2+1)+2=9+8.
Dans l'Histoire de Sinouhé, le passage du duel avec le preux de Réténou peut être divisé stylistiquement en deux parties; la première (B109-131) est divisée en cinq stances dont chacunes sont formées de deux sections, qui à leur tour sont composées de quatre lignes (avec une seule exception), ce qui donne la structure 4+4=8 pour une stance. La seconde partie (R156-B149) serait divisée en trois stances de la structure (2+4)+(2+4) ou (2+4)+(4+2)=12 lignes. Ces structure en 8 ou 12 lignes se retrouvent partout dans l'Histoire, p. ex. R23-B7 (2 stances), B156-64 (2st.), B290-304 (3st.), etc. pour 4+4, et B181-90 (2st.), B199-204 (1st.), B304-10 (1st.), etc. pour 6+6.
Les structures basées sur les groupes de trois lignes (assez fréquentes dans l'Enseignement pour Mérikarê) sont également utilisée dans Sinouhé, p. ex. B98-102 (3+3+3), B223-30 ((3+3)+(3+3)), etc.
Un mélange de ces deux type de structure paraît au premier abord un peu irrégulier, cependant on a en fait plusieurs exemples dans les oeuvres didactiques tels que les Enseignements pour Mérikarê ou d'Aménemhêt Ier. Ce sont les structures 4+(2+3)=9 (R17-22), 4+(3+3)+4=14 (B165-73), etc., ainsi que la première stance de l'hymne à Senwosret Ier qui a une structure de ce genre: 2+3+3=8.
Si on juge par le nombre des copies et le nom des auteurs mentionnés dans les ‘listes des sages anciens’ (Fragm. Daressy et P. Ch. Beatty IV, vs.), les classiques des anciens Egyptiens étaient des oeuvres didactiques, un hymne (à Hapy) et l'Histoire de Sinouhé. La présence de Sinouhé pourrait être expliquée par sa certaine tendence politique, relevée par Posener, mais aussi par le fait que l'Histoire de Sinouhé est écrite, comme toutes les oeuvres didactiques, en vers.