2019 年 25 巻 p. 41-53
André Breton et l’écriture automatique — la juxtaposition des « voix » automatiques dans Le La —
André Breton publie en 1961 Le La, juxtaposition de quatre « voix » que l’écrivain dit avoir notées à son réveil, en différentes occasions entre 1951 et 1956. Ce type d’expérience de la « voix » remonte à l’écriture automatique, qui fut à l’origine du surréalisme. Nous mettons en lumière dans cet article un changement radical de la valeur de la « voix » chez Breton, consécutif à la Deuxième Guerre mondiale.
L’avant-propos du texte contient un résumé des deux expériences antérieures où étaient intervenues des « voix » automatiques : dans « Le Message automatique » (1933), puis « Les États généraux » (1944), elles témoignaient d’une confiance absolue de l’écrivain dans le pouvoir de sa propre « voix ». Or la simple pratique de la juxtaposition ouvre ici de nouveaux horizons, en rupture avec le dispositif antérieur qui consistait à fondre la « voix » automatique dans un texte élaboré.
Une telle inflexion est imputable à l’influence d’un jeu surréaliste auquel Breton s’est adonné vers 1954. Le texte intitulé « L’Un dans l’autre » suggère l’intérêt nouveau pour la voix automatique que Breton a pu retirer du mécanisme à l’oeuvre dans ce jeu, qui nouait en un récit automatique les éléments distincts proposés spontanément par les joueurs.