2024 年 125 巻 p. 37-52
Mûrissage de la poésie baudelairienne en 1860
La position de « Semper eadem » dans la Revue contemporaine
Yasuhiro OGURA
Lorsqu’on situe Charles Baudelaire, on accorde souvent de l’importance au changement qui est survenu entre son poème « Correspondances », écrit en 1845, et celui intitulé « Obsession » publié en 1860. Comme l’a souligné Yoshio Abe, Baudelaire initialement célébrait avec délice le pouvoir du poète, mais laisse entrevoir dans ses œuvres ultérieures un désir d’abandonner cette puissance. La décadence du poète pourrait alors annoncer la fin du Romantisme, tout en préparant le lignage maudit des poètes. Le Symbolisme de Jean-Nicolas Illouz, en décrivant le glissement du style de Baudelaire de symboles sacrés en allégories réalistes, établit que ce lignage est repris par Mallarmé et Rimbaud.
Une analyse plus approfondie dans le cadre restreint des études baudelairiennes révèle cependant d’autres interprétations. Comme l’a montré Mario Richter, Baudelaire envisageait la connexion entre plusieurs poèmes afin de former une seule histoire à travers l’ensemble de ses œuvres. Ainsi, « Obsession », bien que publié en 1860 dans la Revue contemporaine, ne représente pas nécessairement le point final dont le centre pourrait plutôt se trouver dans un poème antérieur de la série, « Semper eadem », traduit par « Toujours la même chose ».
En effet, les rêves sont le thème central de la série, mais ces rêves se dirigent vers le néant. Cependant, le narrateur, incarnation du poète, trouve sa maturité dans le fait de savourer les rêveries précédant le retour au néant. Cette attitude, visant à extraire la beauté d’un monde insatisfaisant, peut être considérée comme un point culminant. Les thèmes similaires à « Semper eadem » apparaissent dans les poèmes ultérieurs, comme dans « L’Amour du mensonge », « Chant d’automne » et « Sonnet d’automne ».