Ecrivain majeur de l'entre-deux-guerres, Emmanuel Bove (1898-1945), de so vrai nom Bobovnikoff, a ete redecouvert dans les annees 1970, grace aux efforts de quelques indefectibles lecteurs. Reeditee par vagues successives, son oeuvre est aujourd'hui integralement disponible, beneficiant d'un public fervent. Fils d'un emigre juif d'origine russe sans profession ni revenus fixes, et d'une domestique luxembourgeoise, le romancier s'interesse aux destins des marginaux, qu'il evoque qvec une lucidite froide et un humour etonnant. Il s'interroge aussi sur sa propre origine, mettant en scene des personnages inspires de ses parents. C'est ce au'il fait dans La Coalition, roman couronne par le prix Figuiere en 1928, dont un personnage secondaire, Alexandre Aftalin, a pour modele le pere de l'auteur : c'est un jeune homme ne en Europe orientale, qui, mysterieusement aimente par la France, fait une lungue peregrination pour s'installer a Paris. Ce motif est ici dilue dans un roman de trois cents pages, mais Bove en fera bientot le coeur d'une nouvelle egalement intitulee La Coalition et reeditee en 1991 sous le title Aftalion, Alexandre. On y percoit un attachement certain de l'auteur aux souveirs de son pere. Or, ≪meteque≫ selon les categories xenophobes alors largement repandues, Bove cherche le plus souvent a s'assimiler, a n'etre que Francais, si bien que la litterature est pour lui le moyen de conjurer ses souvenirs de famille : il s'agit d'une sorte de tentative d'exorcisme. La nouvelle La Coalition constitue donc une exception a cet egard, eveillant, selon l'expression de Jean Cassou, ≪ce qu'il y a en nous de pous abandonne≫.
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