Etudes de langue et litterature francaises
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Conférence spéciale
Études en français
  • avec une attention particulière à la traduction française des Lettres à Lucilius de Sénèque
    Takuya MIYASHITA
    2024 Volume 124 Pages 43-57
    Published: 2024
    Released on J-STAGE: March 31, 2024
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    Les français de l’Italie médiévale

    avec une attention particulière à la traduction française des Lettres à Lucilius de Sénèque

    Takuya MIYASHITA

     

      C’est les textes français écrits en Italie que traite la présente étude. Alors que la langue de Martin da Canal était du « bon » français, l’Italie nous offre une large variété de français. Dans l’Italie septentrionale, on écrit dans une langue hybride qu’on appelle le « franco-italien », pour répondre au goût des auditeurs et des lecteurs. Les textes en français écrits à Naples, la capitale du royaume angevin, montrent aussi un italianisme plus ou moins marqué. Malgré l’étiquette de « français d’Italie », la langue de ces textes n’est pas uniforme : chacun présente des caractéristiques propres, de sorte que chacun requiert une description et une étude lexicale spécifique. Les français du Nord de l’Italie sont de la plus grande variété et ont recours assez souvent à des hapax formels ou lexicaux pour des raisons métriques. Ceux de l’Italie méridionale, d’un autre côté, sont plus conformes au français standard : l’italianisme n’est certes pas absent, mais la forme et le lexique n’empêchent que rarement la compréhension. Dans cet article, nous proposons d’analyser les usages du français dans un panel d’œuvres représentatives, telles que le Roman d’Hector et Hercules, l’Entrée d’Espagne, la Chanson de Roland (V4), ainsi que le Testament de Charlemagne pour les spécimens du Nord et les versions françaises de l’Ystoire de li Normant et des Lettres à Lucilius pour ceux du Sud. Nous accorderons toutefois un intérêt tout particulier à la traduction française des Lettres à Lucilius de Sénèque au début du XIVe siècle, encore inédite à ce jour. Le français y est « correct » avec quelques italianismes lexicaux. Plus nombreux dans ce texte sont, cependant, les mots latinisants qui attestent d’emplois plus anciens que ceux qui ont été reconnus jusqu’à présent. Peut-on constater, dans ce texte napolitain, des emplois du français d’outremer ?

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  • « droits de l’individu et de l’État » dans Bouvard et Pécuchet
    Nobuyuki HIRASAWA
    2024 Volume 124 Pages 59-74
    Published: 2024
    Released on J-STAGE: March 31, 2024
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    Flaubert et le libéralisme politique du XIXe siècle.

    « droits de l’individu et de l’État » dans Bouvard et Pécuchet

    Nobuyuki HIRASAWA

     

      Dans le chapitre VI de Bouvard et Pécuchet, Flaubert tente de remettre en question certains postulats des sciences politiques de son époque, notamment la dichotomie entre les droits de l’individu et ceux de l’État. Dans cet article, nous nous proposons d’analyser la façon dont le « libéral enragé » Flaubert a mis en scène cette dichotomie. Nous examinons en particulier la genèse d’une scène de discussion où les deux protagonistes se disputent avec le notaire du village au sujet de la liberté d’expression et du salut public. Cette scène s’inspire des débats sur les droits respectifs de l’individu et de l’État entre John Stuart Mill et Charles-Brook Dupont-White.

      Caricaturant ces débats, Flaubert attribue aux deux protagonistes du roman des arguments individualistes, et au notaire du village des raisonnements étatistes, comme la doctrine du salut public. Or, le roman révèle qu’une telle dichotomie est en fait inopérante. Car, si le notaire du village invoque le salut public pour justifier des mesures tyranniques, c’est parce qu’il craint que le désordre ne nuise à ses affaires. Indifférent aux affaires publiques, et soucieux de maintenir l’ordre à tout prix, ce personnage figure les écueils de « l’individualisme » tels qu’ils sont décrits par Tocqueville. Paradoxalement, le roman posthume de Flaubert nous montre ainsi que l’étatisme et l’individualisme, se confondant souvent, s’avèrent incapables de garantir les droits individuels face à l’autorité. Sur ce point, notre auteur n’est pas un libertaire, mais un libéral au sens authentique du terme, pleinement conscient des dangers de l’étatisme comme de l’individualisme, deux doctrines intransigeantes.

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  • La réception du haikai chez Paul Claudel
    Ryo GAKUTANI
    2024 Volume 124 Pages 75-91
    Published: 2024
    Released on J-STAGE: March 31, 2024
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    Le haikai comme source de la création des poèmes courts

    La réception du haikai chez Paul Claudel

    Ryo GAKUTANI

     

      De La muraille intérieure de Tokyo à Cent phrases pour éventails, on dit que tous les poèmes courts de Paul Claudel composés au Japon ont été influencés par le haikai. Mais il parle assez peu de ce genre poétique qui était très répandu en France pendant les années 1920. Comment Claudel a-t-il appris l’esprit du haikai pour inventer une nouvelle forme poétique inspirée de la poésie japonaise ?

      Le séisme du 1er septembre 1923 a donné à notre poète l’occasion d’écrire un poème court intitulé « La nuit du 1er septembre 1923 entre Tokyo et Yokohama », celui-ci ayant été composé comme « une espèce d’haikai ». Claudel a sans doute essayé d’appliquer la forme du haikai, poème de trois lignes ou de trois « vers », plus précisément, telle qu’elle est définie dans l’Anthologie de la littérature japonaise de Michel Revon qu’il avait lue.

      Dans sa conférence sur la littérature japonaise, Claudel aborde la tradition de la poésie japonaise, dont l’essence est résumée dans la préface du Kokinshu qu’il aimait à citer. Parmi les genres poétiques japonais, cependant, il ne s’intéresse qu’au haikai, et non pas au tanka. Il est assez probable qu’il ait acquis des connaissances sur le haikai à partir de l’ouvrage de Paul-Louis Couchoud, Sages et poètes d’Asie. Couchoud définit la nature de ce genre poétique comme « exclamation » ; Claudel, quant à lui, trouve que l’originalité de la littérature japonaise consiste dans sa qualité émotive, c’est-à-dire l’« exclamation ».

      L’intérêt de Claudel pour le haikai s’associe étroitement aux questions religieuses. Le sentiment respectueux des Japonais à l’égard du surnaturel permet aux artistes japonais de faire subsister toutes les choses naturelles dans leur « essence passagère », dit-il dans sa conférence sur l’âme japonaise. Cela n’est pas indifférent à l’art du haikai qui consiste, selon Couchoud, à fixer la « brièveté de la vie ». Il est indéniable que cette poétique inspire tous les poèmes courts de Cent phrases pour éventails que le poète a essayé de « mêler à l’essaim rituel des haikai ».

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  • La prolifération de la pourriture, de la désolation et de l’usure
    Naomi YAMASHITA
    2024 Volume 124 Pages 93-107
    Published: 2024
    Released on J-STAGE: March 31, 2024
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    La figure de l’homme ruiné dans L’Herbe de Claude Simon

    La prolifération de la pourriture, de la désolation et de l’usure

    Naomi YAMASHITA

     

      Le roman L’Herbe publié en 1958, qui précède La Route des Flandres de 1960 qui a fait connaître l’auteur au monde, foisonne d’éléments qui détermineront l’orientation de la littérature ultérieure de Simon, tels les herbes qui prolifèrent sur la terre ; l’image significative de la « ruine » et son analogie avec l’humain. Une comparaison des romans ultérieurs révèle certains motifs caractéristiques communs qui traversent toutes ses œuvres ; l’image expressive de l’esprit désolé et la figure d’homme à l’usure. Ses œuvres sont sous-tendues par cette image distincte qui se dessine en L’Herbe.

      Nous examinerons le processus de décomposition, de corruption et de désolation qui se développe à partir de l’expression « corrosion » dans L’Herbe ; on y trouvera une similitude entre les personnages simoniens, les espaces mélancoliques, et les édifices ruinés. La vision du monde de Simon, façonnée après les deux grandes guerres du XXe siècle, part de son scepticisme envers l’anthropocentrisme en cours depuis la Renaissance, en tant que l’inversement de la hiérarchie entre l’homme, la flore et la faune, selon lequel « l’homme n’est qu’une partie du monde naturel ». Les personnages qui ont germé dans L’Herbe, ressemblant à des ruines, sont repris dans les œuvres ultérieures.

      L’Herbe est basée sur la famille de Georges, principalement sur la vie d’une vieille femme mourante, de la véritable tante de Simon, dont le récit est décrit vivement en détails. Également, la macro-histoire de l’érosion et de la circulation du temps, de la mémoire, de la vie et de la mort s’entrelace à la micro-histoire des vies des personnages. Il s’agit que la description de cet entrelacement lui-même évoque ce que des herbes indiquent ; la reproduction, la continuité et la prolifération.

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  • Daisuke SASAKI
    2024 Volume 124 Pages 109-124
    Published: 2024
    Released on J-STAGE: March 31, 2024
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    Le mimétisme de Prométhée dans Au lavoir noir d’André Breton

    Daisuke SASAKI

     

      Les papillons sont le thème qui traverse Au lavoir noir, poème en prose d’André Breton publié en janvier 1936. Il est intéressant que le « je » narrant y ait été introduit pour raconter l’histoire des lépidoptères, parce que le « moi » occupait une place importante dans la pensée de l’auteur dans ce temps-là sur l’automatisme. Ainsi, dans « Introduction aux Contes bizarres d’Achim d’Arnim », « Le Message automatique » et surtout « Position politique de l’art d’aujourd’hui », Breton a décrit le processus par lequel le « moi » était surpris par une pensée venue automatiquement. Or, cette surprise est-elle ce qui se passe dans Au lavoir noir ? La présente étude vise à examiner cette hypothèse, en analysant les troubles causés par les papillons dans la narration à la première personne.

      Les papillons sont, dès le début, les êtres qui viennent troubler l’homme en désirant à la lumière artificielle. Pour donner une forme à leur désir excitant, ils tentent d’utiliser le langage de l’homme, surtout le récit à la première personne. Ainsi, un papillon qui devient « bâillon » possède la bouche du narrateur, un autre le trompe par les ocelles de ses ailes. Les papillons lui volent, en conséquence, le pouvoir de raconter un récit, et l’utilisent pour communiquer leur pensée tendue vers la combustion de leur propre corps. La voix du « je » narrant devient celle de l’autre qui pense selon la logique du désir.

      Notre analyse révèle qu’en écrivant Au lavoir noir, Breton a expérimenté sous la forme d’un récit poétique comment le « moi » était surpris par le message d’un autre sujet qui pense automatiquement par-derrière lui.

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