Etudes de langue et litterature francaises
Online ISSN : 2432-3152
Print ISSN : 0425-4929
ISSN-L : 0425-4929
Volume 123
Displaying 1-17 of 17 articles from this issue
  • Pascal et les Provinciales
    Yasushi NORO
    2023 Volume 123 Pages 55-70
    Published: 2023
    Released on J-STAGE: August 31, 2023
    JOURNAL FREE ACCESS

    Qui est l’auteur des Provinciales ?

    Pascal et les Provinciales

    Yasushi NORO

     

      Les Provinciales (1656-1657) sont depuis longtemps considérées comme un des chefs-d’œuvre de Blaise Pascal. Mais tous ceux qui s’y intéressent reconnaissent unanimement la dimension collective de cet ouvrage. Les noms d’Antoine Arnauld et de Pierre Nicole sont souvent cités en tant que collaborateurs. Pascal n'en est qu’un des représentants. Aujourd’hui, cette œuvre est pourtant perçue comme le fruit du travail d’un seul génie, un des grands écrivains français. Mais qui est le vrai « auteur » des Provinciales ?

      Certains critiques littéraires ne se posent jamais la question de l’auctorialité. Ils ne doutent pas que c’est Blaise Pascal qui les a écrites, en acceptant et transmettant ainsi quelques témoignages dits familiaux. D’autres, plus prudents, distinguent, l’écrivain du personnage et narrateur du récit, et préfèrent utiliser, dans leurs études, le pseudonyme de « Louis de Montalte », qui apparaît dans le titre du premier recueil unifiant le corpus des Lettres.

      Dans cette recherche, nous nous intéresserons d’abord à la façon dont les chercheurs appréhendent la paternité des Provinciales : ils les citent traditionnellement en tant qu’œuvre littéraire de Blaise Pascal ou de « Louis de Montalte ». Ensuite, nous nous appuierons sur quelques documents considérés comme des témoignages pour expliquer cette position de certains critiques, dont la lecture a influencé la tradition pascalienne. Enfin, pour sortir de cette dichotomie de noms, nous insisterons sur l’importance du mot « l’auteur », qui apparaît dans le titre même du premier recueil. Nous verrons ici que « l’auteur » ne désigne pas Blaise Pascal en particulier. En évitant cette identification traditionnelle et littéraire, nous pourrons sans doute découvrir un aspect méconnu de cette œuvre collective et de polémique.

    Download PDF (939K)
  • vers un « chef-d’œuvre vraiment nouveau »
    Satomi SEKINO
    2023 Volume 123 Pages 71-84
    Published: 2023
    Released on J-STAGE: August 31, 2023
    JOURNAL FREE ACCESS

    Héritage de réflexions sur la Sonate de Vinteuil

    vers un « chef-d’œuvre vraiment nouveau »

    Satomi SEKINO

     

      Lorsqu’elles ont abordé le thème de la Sonate pour piano et violon du compositeur fictif Vinteuil, qui évoque la révélation artistique du héros, les études précédentes de À la recherche du temps perdu de Proust se sont concentrées particulièrement sur la description de la Sonate dans Un amour de Swann [=UAS], deuxième partie du premier tome, Du côté de chez Swann (1913), et celle de La Prisonnière (1923) du cinquième tome. Mais la description de la Sonate chez les Swann dans Autour de Mme Swann [=AMS], première partie de À l’ombre des jeunes filles en fleurs (1919) du deuxième tome, qui décrit la première impression du héros après l’écoute de la Sonate, n’est pas considérée comme aussi importante que celle d’UAS.

      Cette étude se propose de réexaminer l’écriture sur la Sonate dans UAS et AMS du point de vue de l’héritage de réflexions sur la Sonate de Swann et de celles du « je » du héros jusqu’à celles du « je » du narrateur, avec un intérêt particulier pour la « nouveauté » de la musique. Nous allons également explorer le sens de cet héritage entre Swann et le « je », en comparant chacune de leurs impressions de la Sonate. Ce travail nous permet de saisir comment ils comprennent le caractère de « nouveauté » de la Sonate, et de mettre en lumière une différence de niveau sur les réflexions esthétiques sur la Sonate de Vinteuil, entre le premier tome et le deuxième tome de ce roman. Nous arrivons à la conclusion que les problèmes de « nouveauté » de la Sonate ne reflètent pas seulement la modernité musicale de cette époque-là, mais qu’ils traitent également en profondeur du thème important de « la vie et l’art » dans UAS du premier tome.

    Download PDF (1028K)
  • Science, Modernité, Autrui. À propos du Texte sur l’électricité
    Shinsuke OTA
    2023 Volume 123 Pages 85-101
    Published: 2023
    Released on J-STAGE: August 31, 2023
    JOURNAL FREE ACCESS

    Francis Ponge, poète des Lumières ?

    Science, Modernité, Autrui. À propos du Texte sur l’électricité

    Shinsuke OTA

     

      À partir de la période de la Seconde Guerre mondiale, Francis Ponge s’affirme en poète des Lumières qui s’attache à éclairer la vérité des choses. Mais dans ses œuvres, l’articulation de la poésie et de la science n’est pas toujours nette. D’où notre question : Ponge est-il vraiment un poète des Lumières ? Pour apporter une réponse à cette question, notre étude se propose d’examiner un des grands textes de cet auteur, le Texte sur l’électricité (1954).

      Dans ce texte rédigé sur commande, Ponge se réfère aux ouvrages des savants pour en composer un « hymne à l’électricité ». La recension des ouvrages scientifiques lui permet de conclure que la science des hommes n’a aucunement progressé. Ce faisant, il évoque un changement de la sensibilité après l’installation de l’électricité dans la vie, quì est qualifié de « modification irréversible du goût ». Qu’est-ce que Ponge problématise dans cette observation ?

      L’analyse et la lecture du texte montrent que Ponge voit dans l’électricité deux éléments. L’un est sa commodité, souvent liée à sa modernité, l’autre son caractère qui échappe à l’intelligence et à la perception. C’est ce second qui a exercé une influence profonde sur la sensibilité des hommes : en les privant du contact direct avec le monde, l’éléctricité a rendu ce dernier impénétrable ou « discontinu ». Le concept d’« autrui », proposé par Deleuze, nous permet de mieux comprendre la portée épistémologique de ce texte. Dans la dernière partie de l’œuvre s’expliquent l’éthique et l’esthétique de ce Nouveau Monde. Ce n’est plus le savant qui y prononce la vérité, mais le poète qui accomplit cette tâche sacrée, tel un « prophète ».

    Download PDF (1040K)
  • Kosaku SHIRAISHI
    2023 Volume 123 Pages 103-118
    Published: 2023
    Released on J-STAGE: August 31, 2023
    JOURNAL FREE ACCESS

    Une lecture de « Dehors la nuit est gouvernée » de René Char

    Kosaku SHIRAISHI

     

      Pendant la période de la guerre d’Espagne, René Char affronte une grave situation. Après sa séparation avec groupe surréaliste, il se retrouve en danger de mort à cause d’une septicémie, dont il réchappe toutefois. Le Front populaire à Paris est pour Char convalescent la source d’un grand espoir, mais le déclenchement de la guerre d’Espagne est un choc profond. Face à cette époque troublée, l’attitude et la poésie de Char commencent à changer.

      Deux recueils de poèmes, Placard pour un chemin des écoliers et Dehors la nuit est gouvernée, sont nés dans la période de la guerre d’Espagne. Ni l’un ni l’autre ne jouissent d’une grande réputation. Mais il est possible de les considérer comme un tournant dans la poésie de Char. Notre article se consacre à l’étude de deux poèmes de Dehors la nuit est gouvernée : « Tous compagnons de lit » et surtout « Dehors la nuit est gouvernée ». Le recueil est publié en 1938, mais ces deux poèmes ont été écrits en 1936-1937.

      Dans la première partie de « Dehors la nuit est gouvernée », il y a une présence féminine énigmatique, représentée seulement partiellement ou métonymiquement. L’amour et le désir du poète pour cet être mystérieux restent insatisfaits et, à la fin de la première partie, cet être s’en va. Dans la seconde et dernière partie, à sa place, un « Monstre » apparaît. Comme on peut le deviner d’après le titre, le poète d’abord n’est pas dehors, mais cloîtré, isolé des autres. Mais au fur et à mesure, il montre son intérêt pour ceux du dehors, jusqu’à sortir pour se retrouver avec eux dans la seconde partie. Signe qu’il a découvert le moyen d’être à nouveau dans la communauté, parmi les autres.

    Download PDF (948K)
  • Relecture de Nathalie Granger à travers le point de vue des personnages féminins et de Marguerite Duras
    Tomoya BABA
    2023 Volume 123 Pages 119-132
    Published: 2023
    Released on J-STAGE: August 31, 2023
    JOURNAL FREE ACCESS

    Regard et subjectivité

    Relecture de Nathalie Granger à travers le point de vue des personnages féminins et de Marguerite Duras

    Tomoya BABA

     

      Dans l’œuvre de Marguerite Duras (1914-1996), nombreux sont les personnages qui sont caractérisés par des termes négatifs tels que « manque » d’intelligence ou « absence » de mémoire. En effet cette tendance se remarque le plus souvent dans les descriptions de leur regard, vide et absent, où l’objet visible n’apparaît pas comme tel.

      Cependant le fait de considérer ces personnages comme mystérieux et incompréhensibles à cause de leur regard sans objectif n’implique-t-il pas que nous dénions leurs propres logiques, c’est-à-dire la subjectivité qui leur est intrinsèque ? Nous examinerons dans cet article plus précisément Nathalie Granger (1973) qui fait ressortir des traits essentiels de ce regard chez l’auteure ainsi que ses personnages féminins, pour tenter de redéfinir ce regard de façon positif contrairement aux études qui précèdent.

      En effet, si l’auteure ne réduit pas ce regard à un simple signe de l’irreprésentable dans son texte, c’est qu’elle est bien consciente d’embrasser le même point de vue que ses personnages. D’où s’impose la remise en cause de la première perspective, pour réfléchir sur la perméabilité de la communication parmi ceux qui partagent la même façon de voir.

      Dans ce contexte, nous analyserons Nathalie Granger à partir d’une expression que la narratrice emploie : « elle regarde » qui, n’ayant pas de complément d’objet direct, souligne d’autant plus le regard lui-même. Nous remarquons ainsi, comme le dit Roland Barthes sur le « j’aime » chez Racine, que cette expression affirme tant l’essence de l’acte que l’existence même du personnage féminin.

    Download PDF (880K)
  • Sur la description des maladies infectieuses aux stades médians de la pandémie
    Mana NAITO
    2023 Volume 123 Pages 133-149
    Published: 2023
    Released on J-STAGE: August 31, 2023
    JOURNAL FREE ACCESS

    Maladie et superstitions

    Sur la description des maladies infectieuses aux stades médians de la pandémie

    Mana NAITO

     

      Comment envisage-t-on une maladie mortelle propagée dans toute la société, une fois passé l’effarement initial qu’elle provoque ? Pour donner suite à notre précédente étude sur les « Représentations de la maladie comme aspects de la peur » (Études de langue et littérature françaises, nº 121), nous considérons dans le présent article l’évolution de celles-ci aux stades médians de la pandémie, période où la maladie commence à être tolérée dans la société tout en restant cependant une menace à sa survie.

      Prenant pour objet d’étude les œuvres considérées comme des classiques de la littérature de la maladie (Defoe, Giono et Camus), voire les plus récentes (Winer et Guibert), notre observation fait ressortir les trois manifestations de superstitions constatées particulièrement à cette phase de l’épidémie :

      En premier lieu, nous nous intéressons aux discours sur « les phénomènes astronomiques », notamment les comètes qu’on évoque souvent en tant que présage de catastrophes, et ce en relation avec l’astrologie ancienne qui relie les phénomènes naturels aux événements apocalyptiques survenant dans la société humaine.

      En deuxième lieu sont considérées « les légendes urbaines » qui veulent attribuer l’origine de l’épidémie à un acte délibéré commis par un individu ou un ensemble de personnes. En citant plusieurs exemples de cette fausse croyance, de la peste au sida, en passant par « Mary Typhoïde », notre travail prouve leur importance dans l’esprit du public obligé de vivre avec une maladie indicible.

      En dernier lieu, notre étude se focalise sur « les remèdes populaires » en opposition aux traitements standards qui se trouvent en état de dysfonctionnement à cause de la pandémie qui ne connaît pas de limites.

      Ces résultats de recherches nous permettront de montrer que, face à une crise sans issue comme une maladie mortelle, on recourt à des discours ou des actes superstitieux. Tout en restant basé sur la peur, sentiment essentiel à la survie, ce penchant révèle un cheminement de la mentalité populaire à la recherche des causes de sa détresse, d’une réaction spontanée et émotionnelle vers une réflexion logique, quoiqu’elle semble irrationnelle à nos yeux modernes. Dans cette nouvelle phase, l’écriture de la maladie consiste ainsi en une révélation des rouages psychiques que seule une catastrophe peut laisser paraître.

    Download PDF (1603K)
feedback
Top